Chasseuse de perles rares
Chaffa Zaroui se charge de dénicher les profils IT pour le secteur financier
C’est à s’arracher les cheveux, les ressources humaines ont tout le mal du monde pour recruter des talents IT pour leurs entreprises. Des profils très demandés qui ont l’embarras du choix et se retrouvent face à des recruteurs qui comprennent mal leur métier. Cet univers, elle le comprend parfaitement. Chaffa Zaroui a passé plusieurs années dans une société de services parisienne spécialisée dans l’intégration de progiciels bancaires qui souhaitait s’implanter à Luxembourg, elle a monté la filiale en passant de 0 à 20 consultants en moins de trois ans. «C’est l’expérience la plus formatrice», se souvient-elle.
Puis elle a rejoint Sopra Steria, le cabinet de conseilIT, en tant que directrice de marché banques et assu-
rances. Elle n’a pas elle-même de profil technique, mais au fil des années, elle apprivoise ce monde et comprend les rouages du secteur. A la naissance de son deuxième enfant, elle prend le temps de la
réflexion, car monter sa propre société lui trotte dans la tête depuis un moment. Chaffa Zaroui intègre un programme d’entreprenariat chez Nyuko, «ce qui m’a permis de tout mettre en musique, de trouver la bonne fiduciaire, d’établir les contrats».
Elle choisit de mettre à profit son expérience dans l’univers de l’IT pour le combiner avec le besoin de l’industrie financière en créant en début d’année Fidès Executive Partner: «Je me suis spécialisée en recrutement IT pour le secteur financier, c’est mon domaine, il y a
une demande, car la pénurie de profils IT est bien réelle partout, mais en particulier au Luxembourg», explique la jeune femme.
«J’aspirais à avoir une autre vie que celle du salariat»
CHAFFA ZAROUI Fondatrice de Fidès Executive Partners
Elle démarre sur ses fonds propres, elle est sa propre actionnaire. Une liberté précieuse, qu’elle ne regrette pas et elle peut se targuer aujourd’hui d’avoir 100% de réussite sur les mandats confiés: «J’aspirais à avoir une autre vie que celle du salariat, mettre la priorité sur ma famille. Je travaille finalement toujours autant, mais avec beaucoup plus de flexibilité pour adapter mon emploi du temps à ma famille et non l’inverse. Je suis de toute façon un esprit libre, je veux pouvoir choisir mes clients et mes candidats. Je me vois d’ailleurs comme partenaire et non prestataire». Evidemment, les agences de recrutement
sont nombreuses dans le pays, mais Chaffa Zaroui a ciblé un marché de niche qui dépasse les compétences des recruteurs généralistes. «Il y a souvent des écarts entre la fiche de poste et la réalité. Je passe en général une demi-journée d’immersion dans l’entreprise pour mesurer les écarts sur les attentes et la fiche de poste, cela me permet aussi de découvrir l’environnement de travail, l’organisation des équipes, les différentes personnalités… J’utilise les méthodes du consulting dans le recrutement».
Dossier complet du candidat
Côté candidats, Chaffa Zaroui les évalue via sa propre plateforme de tests techniques. Une pratique peu courante chez les spécialistes du recrutement, une manière pour la recruteuse d’être sûre d’avoir en face d’elle quelqu’un qui a les bonnes compétences techniques. «Je peux ainsi envoyer le dossier complet du candidat à mon client, les compétences, les résultats du test technique et de langue. Après le premier jour de démarrage du candidat, je reviens 6 à 8 semaines plus tard pour voir si l’onboarding s’est bien pas-
sé», explique l’entrepreneuse.
Elle les coache également, afin de préparer au mieux les entretiens. Longtemps seule dansun monde d’hommes, son tout premier candidat a été… une candidate. «L’IT reste un monde encore très masculin, mais les choses évoluent doucement. Je suis là aussi pour les candidats et je remarque que les hommes postulent quand ils ne répondent qu’à 80% des critères, ils ont une confiance en eux plus naturelle, tandis que les femmes doivent répondre à 150% des critères avant de se lancer… Même chose pour les aspirations salariales, pour le même poste une femme demandera 20 à 30% de moins qu’un homme, je suis là pour mieux les guider et leur redonner confiance».
Si l’entreprise avait démarré sur les chapeaux de roue, le confinement a ralenti cette dynamique. Recrutements gelés, entreprises en stand-by, cette période d’incertitude n’a pas facilité la vie de Chaffa Zaroui. «Pendant le confinement, trois candidats juniors ont démarrés à distance, alors que je travaillais dessus depuis le mois de décembre. C’est délicat pour eux, car ils n’ont pas d’expérience et se sont sentis seuls alors qu’ils sont encore dans une phase de leur carrière où ils ont besoin d’être encadrés, heureusement mes clients ont su parfaitement les accompagner à distance», explique-t-elle.
Le déconfinement a cependant redonné des couleurs à la recruteuse qui sent un frémissement de reprise: «C’était une grosse frustration d’avoir des postes gelés, mais je sens un démarrage depuis début juillet, les immersions en entreprise ont redémarré et nous avons reçu de nouveaux mandats. J’ai bon espoir que les postes soient réouverts».
Pour Chaffa Zaroui, être entrepreneuse demande du courage et savoir mettre le curseur au bon endroit pour bien gérer sa charge de travail. «La clé du succès, c’est de ne pas être seule. J’ai établi mes quartiers à Silversquare, un espace de coworking, car cela me donne l’impression de travailler dans une grande entreprise, et cela me permet de m’inscrire dans un nouvel écosystème».
Article d’Audrey SOMRAD paru le 30 juillet 2020
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